Une chose dont nous ne manquons pas dans notre société, ce sont des experts, et on pourrait supposer que grâce à tous les professeurs d’université et aux scientifiques gouvernementaux, une quantité considérable de connaissances existe en réponse à la question de savoir la quantité de produits qu’il est possible de retirer en toute sécurité d’une surface donnée de terre sans que la fertilité en soit affectée. Toutefois si cette connaissance existe, elle n’est disponible dans le domaine publique.
Cela est peut être du au fait que l’agriculture moderne a évolué de telle manière que ses promoteurs ne reconnaissent pas le concept de la fertilité du sol : les scientifiques considèrent qu’un champ est plus ou moins composé de matière inerte. Une analyse est réalisée et des nutriments sont apportés en quantité et en proportion requise pour une culture particulière. Une fois que la culture a atteint sa maturité, la totalité du matériel récolté peut être vendue l’industrie agro-alimentaire et, en théorie la terre retrouve le même niveau de fertilité qu’elle avait au départ, sans perte de fertilité. Un des problèmes de cette technique est qu’elle laisse les agriculteurs à la merci de l’industrie agro-alimentaires et des usines d’équipements agricoles – ils doivent avoir un tracteur moderne, des outils modernes, doivent utiliser les dernières variétés de culture (possiblement génétiquement modifiées), les dernières formulations chimiques et sont conseillés par d’onéreux consultants en agriculture pour opérer. S’ils sont chanceux, les recettes couvriront tous ces coûts, et leur travail sera récompenser, mais ils n’ont aucune possibilité de contrôle sur la profitabilité de leurs exploitations ou sur la manière de les gérer.
Le problème est encore plus sérieux en ce qui concerne les consommateurs, qui en achetant des produits alimentaires se retrouvent à financer des industries qu’ils n’approuvent pas, et à engendrer un impact négatif direct ou indirect sur leur santé.
Pour un nombre croissant de personnes, la réponse est d’acheter des produits biologiques et de soutenir des petits producteurs ; mais à ce point ils se trouvent face à cette question de savoir combien de produits peuvent être retiré de la terre avant que la fertilité en soit réduite.
Cela n’est pas une question piège (i.e. la réponse n’est pas rien). La Nature est capable de capter l’énergie du soleil, et de la convertir en matière végétale, simplement en utilisant les éléments basiques que sont l’eau, l’air et les minéraux que les plantes peuvent extraire du sol. Si tous les produits sont consommés localement, alors la terre s’enrichit en matières organiques et en minéraux qui sont les sources d’alimentation pour les organismes du sol – champignons, bactéries et insectes. Ces organismes contribuent, à aérer le sol rendant possible le développement racinaire et, à augmenter les réserves en eau. Ils constituent également une source alimentaire pour les animaux des niveaux supérieurs de la chaîne alimentaire, i.e. une proportion non négligeable des produits générés sur une ferme autogérée sert à nourrir la « vie sauvage », et la présence de « vie sauvage » est à la fois un indicateur de la fertilité des sols, et un élément essentiel dans le maintient de cette fertilité.
Lorsque vous travaillez une parcelle de terre, la quantité de « vie sauvage » que vous pourrez observer peut servir de guide pour savoir si oui ou non vous sur-exploitez votre sol. Si la surface de terre est faible, vous ne pourrez espérer voir une augmentation immédiate du nombre des grands mammifères ou d’oiseaux – le processus commence avec les petits insectes et les vers que vous voyez lorsque vous travaillez la terre. Si votre champ est entouré de vastes champs cultivés de manière industrielle, alors il sera toujours difficile pour les grandes créatures de survivre, mais la Nature n’est pas sans ressource, et au fil du temps, un écosystème stable s’établira, le sol deviendra plus riche, les petits oiseaux restreindront leurs territoires à la superficie de votre champ, grenouilles et crapauds commenceront à apparaître, il y aura aussi des lézards, des vipères, des bourdons, des papillons, des campagnols et des petits mammifères.
Plus un champ devient fertile, plus il sera possible d’en retirer de produits – mais il n’y a pas de raccourcis ; en amenant des fertilisants de l’extérieur, il est possible de stimuler les cultures, mais cela n’aide pas les organismes du sol, et la tâche de la restauration de la fertilité se trouve alors simplement reportée à plus tard.
« Une introduction à l’agriculture du XXIe siècle – la travail à la houe – un antidote à la globalisation » en cours de traduction.